Fête du Christ Roi - Année A
22 novembre 2020 - en temps de confinement
Lectures: https://www.aelf.org/2020-11-22/france/messe
Ézéchiel 34, 11-12.15-17
Psaume 22 (23)
1ère lettre de St Paul aux Corinthiens 15, 20-26.28
Evangile de Matthieu 25, 31-46
« J’ai eu faim, j’ai eu soif, j’ai été voyageur, j’ai été nu, infirme, en prison, et vous ne m’avez pas donné, pas recueilli, pas soigné, pas visité. Tout ce que vous n’avez pas fait à un de ces petits, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait » (Mt 25, 42-45)
« Quelle grave parole ! Il n’y a pas à la commenter mais à la croire et à bien voir que tout bien que nous pourrions faire à un homme et que nous ne lui faisons pas, c’est à Notre Seigneur que nous négligeons de le faire…
Cet homme qui passe et qui est pauvre, nu, voyageur, souffrant, ne nous demande rien, mais il est membre de Jésus, portion de Jésus, partie de Jésus ; nous le laissons passer sans rien lui donner de ce dont il a besoin… C’est Jésus que nous avons laissé passer… » (Aux plus petits de mes frères - Nouvelle Cité 1973 pp. 92-93)
Ainsi s’exprime Charles de FOUCAULD, « cet homme à qui rien ne manquait, qui a dû tout quitter pour trouver ce qui lui manquait » (Rania, la jeune musulmane qui faisait visiter le Bordj à Tamanrasset). Il fera l’expérience de sa propre pauvreté, lors de sa deuxième conversion. A Noël 1907, la région du Hoggar connaît la famine. Charles n’a plus rien. Atteint du scorbut, il pense mourir. Les Touaregs vont le sauver, en recueillant pour lui du lait de chèvre à des kilomètres à la ronde. Jusque là, il se voulait le dernier petit, mais c’est quand même lui qui donnait. Maintenant, il a besoin des autres, il apprend à recevoir. Découvrant la réciprocité du don, il va alors pouvoir réellement devenir le petit frère universel.
Si en l’autre, le Christ nous invite à découvrir son propre visage, nous pouvons découvrir que nous sommes nous aussi cet autre, faible, misérable ! Le prophète Ézéchiel nous révèle ce Dieu venu lui-même soigner la brebis chétive que nous sommes, la veiller, la délivrer, la faire paître. Pourquoi sommes-nous si angoissés ? Pourquoi avons-nous si peu confiance en Jésus, notre seul Bon Pasteur ? Écoutons cet autre prophète, Jérémie, s’adressant au peuple en exil : « Je vais vous donner un avenir un avenir et une espérance ». (Jér 29, 11)
En 2014, quand DAECH a expulsé tous les chrétiens de Mossoul, ceux-ci perdaient confiance. Mgr SAKO, leur évêque, réagit : « Vous commettez un péché de désespoir. L’espérance chrétienne, ce n’est pas que demain, ça ira mieux mais que, quoi qu’il arrive, Dieu ne vous abandonne pas. » Oui, malgré les apparences, Dieu a pour nous un projet de bonheur !
Ce dimanche marque pour les Catholiques la fin de l’année liturgique. Comme s’il s’agissait de faire le bilan de notre vie, de peser notre existence et percevoir son poids d’humanité, de fraternité ! Pourtant, nous semblons bien loin de tout cela. Nous nous affairons ailleurs, nous attendons de pouvoir aller à la messe et recevoir le corps du Christ. Pensons à cette Église de Corée qui a vécu tant d’années sans prêtres et sans sacrements. Ne serait-ce pas pour nous l’occasion de redécouvrir un autre sacrement qui nous met en communion avec Dieu, celui de la Confession et de la Réconciliation ? On ne peut pas dire que les Catholiques en abusent…
Ouvrons les yeux : où le Christ est-il présent ? Il nous le dit, il est là, il nous attend, il se révèle dans le visage de ces petits, et sa présence est toute aussi réelle : malades qui meurent encore bien seuls, tous les laissés pour compte, ceux qui vont perdre leur emploi, les personnes isolées ou celles âgées dans leur EPADH, ceux qui restent enfermés dans leurs peurs, avec pour seul interlocuteur leur télévision si anxiogène, les SDF encore plus abandonnés. Oui, Dieu est là : allons-nous percevoir sa présence, ou allons-nous une fois de plus rater la rencontre ?
Cette fête du Christ Roi de l'univers nous dit combien la toute puissance de Dieu est puissance d’amour ! Seigneur, aujourd’hui, en ce temps de confinement, même si je ne peux me présenter à ta table eucharistique, je peux moi-même t’inviter à ma table de pécheur. Oui, je suis confiné, mais je ne suis pas coupé de mes frères et sœurs,. Et si j’allais davantage à leur rencontre ! Si j’allais à ta rencontre, Seigneur... Si je savais voir l’autre comme tu me regardes, avec ta bienveillance et ta miséricorde, sans tous mes à priori ni mes jugements.
Le vendredi saint, avec sarcasme, Jésus est habillé de pourpre tel un roi, il porte une couronne d’épines. Il est suspendu à la Croix ; voici son trône de gloire ! Certains sont au rendez-vous : Marie sa mère accompagnée du disciple bien-aimé, Simon de Cyrène, Véronique et les femmes de Jérusalem, Marie-Madeleine et celles qui avaient suivi l’homme de Nazareth, le bon larron, le centurion, Nicodème et Joseph d’Arimathie... D’autres n’ont pas compris : Judas, Pilate, Caïphe et les chefs des prêtres, le roi Hérode, la soldatesque, tous ces bien-pensants et ces badauds hurlant sans raison. Ils passent à côté ! Ils laissent passer le supplicié, le crucifié, dans l'indifférence ou la haine. Même les apôtres s'enfuient. Par trois fois, Pierre nie connaître Jésus…
Aujourd’hui, en ces temps qui sont les derniers, ne manquons pas la rencontre ! Rencontre avec nous-mêmes, rencontre avec notre frère, notre sœur. Ils sont le visage du Christ… Le Seigneur passe...
Amen
Jean de SOOS, El Padrecito
https://www.aelf.org/2020-11-22/france/messe
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